Témoignages

La course pieds nus en quelques questions (témoignages croisés)

Fred, JL, Manu, Chloé : ils ont en commun de pratiquer la course pieds nus, chacun à sa façon. Ils nous font partager leur expérience en répondant à quelques questions.

► Depuis quand courez-vous pieds nus ?

Fred : Cela fait plus de 6 ans.

JL : Un peu plus de 2 ans. J’ai commencé en février 2013, et contrairement à ce qu’on pourrait penser ce n’est pas un mauvais moment pour débuter. En fin d’hiver quand il fait beau la route est tiède, c’est très agréable. Le gros de la progression se fait au printemps, qui est une saison très favorable avant les grosses chaleurs, et on a le temps de passer tous les caps importants avant l’hiver suivant !

Manu : J'ai commencé à courir pieds nus début 2005.

Chloé : Je cours depuis longtemps, mais mes premières foulées pieds nus remontent à novembre 2014.

Qu'est ce qui vous a poussé à courir pieds nus ?

Fred : J'ai depuis tout petit évité les chaussures dans la mesure du possible. Il y a quelques années j'ai découvert la course pieds nus, et ça a été une révélation pour moi ! Plus aucune douleur de genoux ni de dos, j'ai appris à courir à partir du moment où j'ai enlevé mes grosses chaussures !

JL : D’abord un intérêt pour l’approche minimaliste de la course. Pour les pieds nus, à la fois la curiosité et le constat qu’il était plus facile d’adapter sa foulée et d’éviter d’en faire trop et trop vite pieds nus. Pas facile au début de courir longtemps sur un sol rugueux ! Mais c’est une limite utile, qu’on dépasse ensuite facilement.

Manu : La volonté de courir plus efficacement m'a amené à chercher des conseils pour rendre plus efficace ma foulée. De sites internet en sites internet, j'en suis arrivé à comprendre que la course pieds nus pouvait être un bon exercice pour cela. Après une blessure, j'ai décidé d'essayer de courir le plus souvent possible pieds nus, et au bout de quelques mois, de courir tout le temps comme cela.

Chloé : La curiosité ! J'ai abordé le monde du barefooting un peu par hasard sur un blog et ensuite sur le forum. Ce que j'ai lu m'a convaincue et donné envie d'essayer.

Y a-t-il certaines précautions à prendre ?

Fred : Oui il faut réapprendre à courir et cela peut prendre du temps pour réveiller les muscles et articulations des pieds, chevilles et mollets. Il est important d’être à l'écoute de son corps et surtout de ne pas forcer les choses. Pour certains cela peut prendre quelques mois et pour d'autres (comme moi) plusieurs années.

JL : La progressivité évidemment. Pour un coureur qui court très régulièrement, il faut s’attendre à lever un peu le pied ! Donc à ne pas tenter dans une période où on a des objectifs chronométriques. Mon choix pour démarrer a été de mixer course pieds nus et chaussée pour ne pas réduire drastiquement ni mon activité ni mes terrains de jeu. Peut-être pas le plus facile, mais ça m’a bien convenu. Je continus de mixer les deux d’ailleurs.

Manu : Oui, il faut augmenter la charge d’entraînement très progressivement sinon l'euphorie des premiers temps risque de se transformer en coup de déprime après la survenue d'une grosse blessure que l'on n'a pas vu arriver. La fracture de fatigue d'un métatarsien est le problème le plus courant chez ceux qui ont voulu griller les étapes (moi y compris).

Chloé : Être à l'écoute de son corps ! Pieds nus, les muscles et les articulations sont sollicités différemment, donc (pour éviter les traumatismes) ne pas insister quand les premières douleurs surviennent. Si on est entraîné à la course chaussée, ne pas chercher à retrouver trop vite les distances et les chronos habituels.

Quels sont les points positifs que vous en tirez ?

Fred : Un plaisir de fouler le sol pieds nus, une découverte de son environnement, et aussi un réel travail sur soi-même : quand on évolue pieds nus on ne regarde plus les choses de la même façon, on est en contacte avec le sol,presque en osmose ! Et là seul le plaisir compte. Aussi la totale disparition des douleurs liées a la course : dos, genoux , chevilles, etc.

JL : C’est agréable, on se sent très léger et libre, ça oblige à courir proprement. C’est déjà pas mal non ? Sinon, je ne me blessais pas avant et ça n’a pas changé, j’aime courir pieds nus mais aussi légèrement chaussé pour profiter de parcours plus difficiles ou ne pas être limité lors de compétitions, je ne vais ni moins vite ni plus vite qu’avant... Courir pieds nus ajoute quelque chose à ma pratique antérieure, mais ne s’y substitue pas. Un truc très positif quand même : les pieds ne s’usent pas et les chaussures minimalistes s’améliorent au cours du temps en devenant plus légères et plus souples. Génial non ?

Manu : Les sensations sont beaucoup plus variées qu'avec la course en chaussures, même celles dites "minimalistes". J'ai le plaisir de sentir les diverses textures et températures de sols sous ses pieds, ceux-ci sont toujours à l’air libre, je cours en silence, souple, en ayant l'impression d’être capable d’utiliser pleinement une partie de mon corps qui est à tort souvent négligée.

Chloé : D'une part, un changement de "philosophie" dans ma pratique du jogging : la vitesse plus lente m'a amenée à mettre de côté la recherche de la performance pour mieux profiter de l'environnement, dans un esprit plus "balade". D'autre part, ça m'a donné des idées (concluantes) pour de meilleurs appuis dans d'autres sports.

Quelles sont les difficultés que vous avez rencontrées ?

Fred : A vouloir progresser trop vite, je me suis blessé, et après quelques mois d’arrêt, obligé de tout reprendre a zéro ! Mais ça a été finalement une bonne expérience, cela m'a appris à écouter mon corps, et à détecter et analyser les failles et les risques. Maintenant je suis capable de courir pieds nus sur presque n'importe quel terrain !

JL : Pas de réelle difficulté. Un passage difficile au début le temps d’habituer un peu la plante des pieds (mais c’est très utile pour freiner l’enthousiasme !), un second passage délicat quand on commence à ne plus trop apprécier de mettre des chaussures classiques pour courir, sans être encore prêt à tout faire pieds nus ou en minimalistes. Pas vraiment de difficulté d’acceptabilité non plus. Le fait de courir aide : les gens sont moins perplexes devant un coureur pieds nus que devant un passant pieds nus. Et une fois que c’est acquis pour la course, ça choque moins pour la marche !

Manu : Les fractures de fatigue de divers métatarsiens ont ponctué mes premières années de course pieds nus, mais en ayant été plus raisonnable dans la progressivité et l'intensité de mon entraînement, je pense que je les aurais évitées.

Chloé : Seulement quelques tensions musculaires au début, et devoir accepter la nécessité de repartir de zéro malgré mon entraînement préalable : je retrouve maintenant (au bout de 5 mois) mes distances habituelles, mais pas encore ma vitesse ‒ il est vrai que je ne le recherche pas spécialement ! J'ai un peu de mal avec les surfaces agressives (gravillons, etc) que j'évite soigneusement au profit de terrains plus faciles.

Un souvenir ou une étape marquant(e) ?

JL : Quand on commence de nouveau à faire des séances rapides, sans trop se préoccuper du sol. On a réellement l’impression d’avoir franchi un palier. Et quel plaisir les séances rapides pieds nus !

Manu : Sûrement le marathon que j'ai couru pieds nus, à La Rochelle en 2010. La température était comprise entre 1° et 3°, il pleuvait, le parcours comportait des portions de bitume très rugueuses, bref, les conditions n'étaient vraiment pas idéales pour courir pieds nus 42 km, et j'ai fini avec des ampoules énormes... mais malgré tout sous la barre des 3 h, ce qui était mon objectif initial, et je fus très satisfait de réussir ce petit défi.

Chloé : Peut-être mon dernier parcours de 2014 dans ma région d'origine en Belgique. Rétrospectivement, il me semble que c'est là que j'ai vraiment commencé à changer mon approche de la course à pied : moins de performance, plus de plaisir !

Combien de temps a duré la transition ?

JL : En trois mois on a déjà fait beaucoup de chemin : séances de 45 minutes, intégration de fractions plus rapides par exemple. Déjà suffisant pour prendre beaucoup de plaisir !

Manu : Elle fut rapide, au bout de seulement 3 à 4 mois je faisais tous mes entraînements pieds nus avec le même volume qu'avant (mais tout de même moins vite). Mais comme je l'ai dit plus haut, ce fut trop rapide et la fracture de fatigue est survenue. Certains conseillent d'y aller progressivement sur un an, c'est sûrement plus raisonnable pour les gens qui s'y mettent alors qu'ils n'ont jamais pratiqué auparavant d'activité sollicitant les pieds nus, comme c'était mon cas.

Chloé : Je n'ai pas été convaincue par le conseil de commencer en mixant la course chaussée et la course pieds nus, ça ne me paraît pas le meilleur moyen pour bien "installer" sa nouvelle foulée et ses nouveaux appuis. Donc pas de transition pour moi ! Mais si on entend par là le temps nécessaire pour retrouver les chronos chaussés, alors la transition n'est pas terminée, et elle ne le sera peut-être jamais, vu que ce n'est plus mon objectif.